Le droit de préemption urbain est la priorité accordée à une collectivité locale pour acquérir un bien immobilier dans le cadre d’une vente ou d’une donation non familiale. C’est l’une des seules limites qui s’oppose à la liberté du propriétaire de vendre son logement à l’acheteur de son choix. Souvent associé à des délais allongés et des prix négociés, le droit de préemption urbain inquiète à juste titre les vendeurs.

Comment le droit de préemption urbain s’exerce-t-il ?

Quelles sont les conséquences ?

Quid en cas de désaccord ?

Le champ d’application du droit de préemption urbain

Le droit de préemption urbain (DPU) s’applique uniquement dans les zones de préemption. Elles sont définies par la collectivité, par délibération. Pour les connaître, il suffit d’en faire la demande auprès du service urbanisme de sa mairie ou de consulter le Plan Local d’Urbanisme (PLU).

Dans les zones de préemption, la collectivité a la priorité pour acquérir un bien immobilier mis en vente. Créé par la loi du 18 juillet 1985, le DPU a pour vocation de faciliter la réalisation d’un projet d’aménagement urbain d’intérêt général : opérations de renouvellement urbain, création d’équipements collectifs, construction de logements sociaux, lutte contre l’insalubrité, accueil des activités économiques, développement des loisirs.

Le droit de préemption est exercé par la collectivité qui détient la compétence en urbanisme. En règle générale, c’est la commune. Mais la compétence peut être déléguée à l’intercommunalité, voire à la Métropole dans les très grandes agglomérations (Paris, Lyon). Le préfet peut aussi actionner ce levier pour répondre à la carence de logements sociaux.

Le droit de préemption concerne tous les types de biens immobiliers ; maisons individuelles, appartements, immeubles et terrains, vendus par une personne privée ou morale.

Comment s’exerce le droit de préemption urbain ?

Les modalités d’exercice du droit de préemption urbain sont régies par l’article L213-1 et suivants du Code de l’urbanisme.

Si le bien immobilier en vente est situé dans une zone de préemption, le vendeur ou son intermédiaire – dans la majorité des cas, le notaire -, doit avertir la collectivité de la vente en cours. Cette information s’effectue via une déclaration d’intention d’aliéner (DIA) indiquant le prix et les conditions de la vente. La démarche s’effectue le plus souvent après la signature du compromis de vente. Le DPU constitue une condition suspensive de vente. La déclaration d’intention peut aussi être anticipée pour gagner du temps.

La collectivité a deux mois pour faire part de sa décision de préempter ou non. Elle peut adresser une demande unique de communication de renseignements complémentaires. Le délai est alors suspendu.

L’absence de réponse de la collectivité vaut renonciation. Dans ce cas, le propriétaire garde la liberté de vendre son bien immobilier à l’acquéreur de son choix et la vente se poursuit. Si la mairie se déclare acquéreuse, la transaction en cours est annulée pour donner priorité à la commune.

Les conséquences de la préemption pour le vendeur

La collectivité préempte et achète sans réserve

La mairie peut préempter sans réserve. Cela signifie qu’elle décide d’acheter le bien aux conditions fixées par le vendeur. C’est la situation idéale pour le propriétaire, même si elle allonge les délais.

La vente est conclue via un acte authentique signé par le propriétaire et la mairie. Celle-ci a jusqu’à quatre mois pour verser les fonds au vendeur. Tant que le paiement n’est pas intégralement versé, le propriétaire conserve la jouissance de son bien. Si le logement est vendu loué, il continue à percevoir les loyers.

La collectivité préempte et achète avec réserves

La collectivité peut accompagner sa décision de préempter de réserves. En général, c’est qu’elle souhaite négocier le prix de vente. Pour le propriétaire, la situation se complique. En cas de désaccord, la procédure peut durer plus d’un an.

La mairie dispose de deux mois pour proposer un nouveau prix. Le propriétaire a également deux mois pour accepter l’offre, maintenir son prix ou renoncer à la vente.

À défaut d’accord amiable, le tribunal est saisi. C’est le juge de l’expropriation qui prend le relais pour fixer le prix d’acquisition en se conformant aux prix du marché. Après accord, l’acte authentique de vente est signé dans un délai de trois mois.

Peut-on s’opposer à la décision ?

Si le propriétaire considère la décision de préempter comme abusive, il peut saisir la juridiction compétente en la matière dans les deux mois suivant la décision. La commune doit alors prouver l’existence d’un projet d’aménagement concret justifiant son droit de préemption.

Longue, cette procédure peut cependant décourager les propriétaires. Beaucoup préfèreront opter pour la demande de révision du prix auprès du juge de l’expropriation. Plus rapide, cette solution permet de finaliser la vente dans des conditions acceptables.

Une fois le bien acquis par la collectivité, le propriétaire – mais aussi le potentiel ancien acquéreur -, disposent encore d’un droit d’annulation de la vente pendant cinq ans.

Si la mairie renonce à l’opération urbaine d’aménagement qui a justifié son droit de préemption, elle doit proposer son rachat en priorité à l’ancien propriétaire et, dans un second temps, au potentiel ancien acheteur. C’est la procédure de rétrocession. Si la collectivité ne respecte pas cette obligation, ils sont en droit de demander l’annulation de la préemption et de réclamer des dommages et intérêts.